jeudi 14 février 2013

LA QUESTION DE LA REUNIFICATION DU CAMEROUN AUX NATIONS UNIES (1946-1961)



                                                                         
                                           Par    Samuel EFOUA MBOZO’O
                                                     Maître de conférences
                                                    Faculté des Lettres et Sciences Humaines
                                                    Université de Douala



Introduction 

Protectorat allemand (1884-1916), Territoire sous mandat de la Société des Nations (1919-1945), Territoire sous tutelle de l’Organisation des Nations Unies (1946-1960/1961), le Cameroun, décidément, était voué à l’ “ internationalisme «[1]
en attendant son indépendance et sa réunification.
Il serait fastidieux de retracer ici le long processus qui a conduit à la réunification du Cameroun. On se rappelle, en effet, que le Cameroun, dont la côte aurait été fréquentée successivement par les Carthaginois (Périple d’Hannon, vers ca 471-472)), les Portugais(Rio dos camaroes,vers1472), Espagnols, les Britanniques( vers 1840), les Français ,etc est connue comme entité territoriale avec l’arrivée des Allemands en 1884. En trente ans d’administration allemande, le Cameroun a atteint une superficie de plus de 700 000 km² (NEU KAMERUN). Mais la Première Guerre mondiale-qui a duré moins de deux ans au Cameroun (août 1914-février1916)- vint changer le cours de l’histoire de notre pays.
En effet, la Première Guerre mondiale se termina au Cameroun le 20 février 1916 avec la capitulation de Mora. Les Allemands se réfugièrent en Guinée espagnole, territoire neutre comme la métropole, l’Espagne. Mais bien avant la fin de la guerre au Cameroun et à la suite de l’occupation de la ville de Douala par les forces alliées en septembre 1915, un condominium, sorte d’administration commune, spéciale et provisoire, fut établi entre les Français et les Anglais.        



Aussitôt après le départ du dernier Allemand, les vainqueurs se partagèrent le butin de guerre. L’Accord du 4 mars 1916 mit fin au condominium et définit les frontières d’influence de la France et de la Grande Bretagne.[2]
           
Lors de la conférence des préliminaires de la paix tenue à Paris le 24 janvier 1919, on aborda la question des colonies. Si la non restitution à l’Allemagne de ses territoires fit l’unanimité des participants, la question du sort à assigner à ces territoires par contre fut diversement interprétée.
         
Pour le président américain Wilson, dans le 5e des 14 points qu’il énuméra devant le Congrès des Etats-Unis le 8 janvier 1918, il préconisa « un arrangement librement débattu, dans un esprit large et absolument impartial, de toutes les revendications coloniales, fondé sur la stricte observation du principe que, dans le règlement de ces question de souveraineté, les intérêts des populations en jeu pèseront d’un même poids que les revendications équitables du gouvernement dont le titre sera à définir »[3] Ce langage  a laissé croire que le Président Wilson avait en vue l’internationalisation des colonies allemandes avec leur administration confiée à la Société des Nations.
    
       
Les Alliés, par contre, étaient d’accord pour l’annexion pure et simple des colonies allemandes. Après plusieurs jours de discussions et de concessions  réciproques, un projet de “Covenant ” de la ligue des Nations fut publié le 13 février 1919. Son article 19 qui prévoyait le Mandat colonial devait devenir l’article 22 du Pacte de la SDN. Ce qui provoqua des protestations de la part des Anglais et Français qui ne souscrivirent pas à l’arrangement. Le projet du 13 février fut amendé et adopté à l’unanimité par la conférence de paix le 25 avril 1919.
           
Le Traité de Versailles signé le 28 juin 1919 fixa le sort réservé aux colonies allemandes. Conformément aux articles 118 et 119, “ l’Allemagne renonce en faveur des principales puissances alliées et associées à tous ses droits et titres sur ses possessions d’Outre-mer”. Mais, bien avant la signature du Traité de Versailles et en vue de la renonciation de l’Allemagne, le Conseil supérieur, représentant les principales puissances alliées et associées, avait pris, le 7 mai 1917, une décision répartissant les colonies sous le régime de mandat, en formules A, B et C, régime proposé par Smuts, représentant Sud-Africain. Le Cameroun se trouva classé sous la formule B regroupant les pays à revenus moyens.
           
Les Anglais et les Français, vainqueurs des Allemands au Cameroun, se virent ainsi confier le mandat sur ce dernier. Le 10 juillet 1919 à Londres, la France et le Royaume-Uni fixèrent les limites de leurs zones d’influence respectives et  demandèrent aussitôt l’application du régime de Mandat. Celle-ci intervint en juillet 1922 :
“ Ainsi, le Cameroun qui, depuis toujours, avait une vocation à l’internationalisme historique devenait la propriété privée et chasse gardée de deux puissances … ”[4]
           
Le Cameroun fut donc  divisé en deux entités administratives, française et britannique. Si la partie confiée à la France a gardé son unité territoriale et l’homogénéité de son administration jusqu’à l’indépendance le 1er janvier 1960, la partie confiée au  Royaume-Uni, par contre, a subi des modifications sur les plans territorial, politique et administratif. Cet héritage « colonial » a pesé et continue de peser sur l’évolution du Cameroun, cinquante après son indépendance et sa ré unification.
Le présent article examine le processus ayant conduit à l’indépendance et à la réunification du Cameroun  à travers les débats à l’ONU. A cet effet,  il présente , dans un premier temps , les forces en présence (1ère partie ) avant d’examiner l’enchaînement des évènements  et de ces forces dans chaque Territoire  sous tutelle(2ème et 3ème parties).

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